Assujettissement sociétés administrateurs à la TVA

Depuis le 01.06.2016, les sociétés qui occupent les fonctions d’administrateur d’une autre société doivent être des assujettis à la TVA.

Néanmoins, ces sociétés prestent souvent des services au titre d’administrateur de sociétés ainsi que des services autres.

Se pose alors la question de l’assujettissement à la TVA. Cette question est d’autant plus importante lorsque la société administrée effectue des opérations hors champ d’application de la TVA ( comme par exemple des prestations de services visées à l’article 44 du Code de la TVA ).

Ainsi, par exemple, une société de management pourrait exercer un mandat dans une société qui effectue des opérations d’assurances.

La décision TVA E.T. 127.850 du 30.03.2016, qui fait suite à la décision E.T. 125.180 du 20.11.2014 analyse la question de manière approfondie. Elle comporte 15 pages.

On trouvera ci-après l’analyse du texte de cette décision.

Mandat rémunéré ou pas…

L’exercice du mandat ne donnera lieu à application de la TVA que si le mandat est effectivement rémunéré.
Si les statuts prévoient que le mandat s’exerce à titre gratuit, la prestation sortira du champ d’application de la TVA.

L’assujettissement à la TVA vise à la fois les rémunérations périodiques et les rémunération non périodiques. Elle vise aussi les rétributions liées au résultat, telles que les tantièmes.

La décision analyse les différentes sortes de revenus bénéficiaire en précisant ce qui suit :

  1. les dividendes ne rentrent pas dans le champ d’application de la TVA
  2. par contre les rémunérations périodiques, fixes ou variables, entrent dans le champ d’application de la TVA depuis le 01.06.2016
  3. les jetons de présence sont également soumis à la TVA
  4. les tantièmes sont soumis à la TVA, puisqu’ils constituent la contrepartie, en espèces, du service fourni. Les tantièmes dépendent toutefois de l’existence d’un résultat positif au terme de l’exercice

Rémunérations des liquidateurs…

Le liquidateur peut être une personne interne à l’entreprise ( associé ou gérant ). Il peut être aussi une personne externe à celle-ci ( avocat ou professionnel du chiffre par exemple ).

Le liquidateur, s’il agit en tant que personne morale, peut percevoir des paiements intermédiaires antérieurs à la clôture de liquidation.
La décision précise toutefois que le droit aux honoraires du liquidateur judiciaire n’existe que lors de la clôture de liquidation. Cette clôture est décidée par le Tribunal après approbation du plan de répartition de l’actif entre les différents créanciers.
Dans les faits, on verra souvent que ce sont souvent des tiers personnes physiques qui remplissent la fonction de liquidateur

Avantages et désavantages d’une unité TVA…

La société administrateur et la société administrée peuvent constituer ensemble une unité TVA ( article 4, §2 CTVA et AR n° 55 du 09.03.2007 ).

Une unité TVA peut en effet être constituée par des personnes établies en Belgique. Ces personnes doivent être indépendantes du point de vue juridique. Elles doivent en outre être étroitement liées entre elles sur les plans financier, économique et organisationnel.

Ces notions existent notamment :

1. s’il existe de liens financiers. Ces liens peuvent se matérialiser par la détention de participation d’une société dans l’autre. Ils peuvent l’être aussi par la détention de participations par le même actionnaire, faisant partie ou pas de l’unité TVA.
2. s’il existe entre les sociétés, en droit ou en fait, directement ou indirectement, un lien de contrôle. Le lien de contrôle est de droit :

  • en cas de détention de la majorité des droits de vote
  • lorsqu’un associé détient le pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des administrateurs
  • lorsque le pouvoir de contrôle est exercé par un associé en vertu des statuts ou de conventions
  • lorsqu’un associé dispose de la majorité des droits de vote en vertu de pactes d’associés

Une unité TVA est une fiction comportant plusieurs assujettis.

A l’intérieur d’une unité TVA, les factures entre les membres se font sans application de la TVA.

Créer une unité TVA pour éviter le préfinancement de la TVA peut donc avoir un intérêt.

Toutefois, il y a un inconvénient majeur. Les membres d’une unité TVA sont en effet solidairement responsables de toutes les dettes TVA de l’unité TVA ( article 51ter CTVA )

La localisation des prestations de services….

Les règles normales de localisation de prestations de services vont s’appliquer dans les relations entre la société administrateur et la société administrée.

Il faudra dès lors distinguer si la société administrée est

  • un assujetti à la TVA ( règle Business to Business : B2B )
  • un non assujetti ( règle Business to Customer : B2C )

Si la société administrateur et la société administrée ont leur siège de direction ou leur activité économique en Belgique, la TVA belge sera due.

Lorsque le prestataire de services n’est pas établi en Belgique, la TVA belge sera due par le preneur de services ( la société administrée ) par application de l’article 51, §2, 1° CTVA

Les règles B2C sont plus simples. Si la société administrateur a en Belgique son activité économique ou un établissement stable à partir duquel le service est rendu, la TVA sera due en Belgique.

Fait générateur et exigibilité de la taxe…

En la matière, ce sont les règles normales qui s’appliquent.
La TVA est due à l’expiration de chaque période au cours de laquelle sont intervenus des paiements ou des décomptes successifs.

A défaut de décomptes ou de paiements successifs, la prestation est censée être effectuée lorsqu’elle est parfaite.

Les liquidateurs personnes morales….

Les liquidateurs personnes morales sont des organes de la société, et les règles d’assujettissement à la TVA sont d’application.

Il faut toutefois distinguer le cas des liquidateurs personnes morales des liquidateurs personnes physiques. Ces derniers facturent parfois par l’intermédiaire de leur société professionnelle leurs prestations. Dans ce cas, c’est bien la personne physique qui est administrateur. La société n’intervient alors que pour les besoins de la facturation et de la perception des honoraires.

Exemptions de TVA….

Si les administrateurs personnes morales effectuent, à côté de l’exercice de leur mandat, d’autres opérations qui sortent du cadre de leur mission statutaire de gestion, de contrôle et de direction, chacune des prestations doit être envisagée, au niveau TVA, comme des opérations distinctes et indépendantes.

Ainsi, par exemple, si un administrateur personne morale rend des services à un courtier en assurances, ces services seront eux-mêmes exemptés de TVA. En effet, les opérations d’assurances sont exonérées de TVA en verte de l’article 44 du Code de la TVA.

La règle visée aux points 59 et 70 de la décision est la suivante : les activités doivent être déterminées de manière objective ( point 59 de la décision ) et elles doivent être scindées en plusieurs éléments, pour autant que cette distinction soit étayée par des éléments contractuels ou des dispositions statutaires permettant d’en déterminer la nature exacte ( point 70 de la décision ).

A défaut d’éléments objectifs, 25% des prestations sont censées correspondre aux prestations d’administrateur ( point 57 de la décision ), mais il s’agit de l’exception à défaut de preuve.

Droit à la déduction de l’administrateur personne morale….

En la matière, les règles de classiques de déduction de la TVA s’appliquent : la TVA est déductible sur les biens et services qui concourent à la réalisation d’opérations imposables.

Le système d’assujettissement partiel est également applicable.

Il en sera ainsi par exemple dans le cas cité ci-avant : une société administrateur effectue des prestations de service dans le domaine des assurances.

Régime de la franchise de la taxe ( article 56, §2 CTVA )….

A ce niveau, il n’y a rien de particulier non plus : la décision précise que les administrateurs personnes morales peuvent bénéficier du régime de la franchise selon les règles normales ( régime d’option, CA annuel inférieur à 25.000 Eur etc… )